Paratopier la mode


Ce projet vise à questionner l'intégration de la technologie dans l'industrie de la mode à travers l'utilisation de la fiction. Le vêtement interactif agit comme un nouvel acteur entre un corps et son environnement, anticipant ses besoins.



Scérnarios Fictions

2090

Février 2090.
Il paraît que des personnes sensées ont tenté de prévenir des dangers, des catastrophes. Il parait même que c’était il y a plus de 100 ans que ça a démarré. Pourtant, personne n’a agi. Sûrement parce qu’ils étaient trop occupés à autre chose. Le fait est que maintenant, on ne peut plus y faire grand-chose. Les gens s’entassent tous dans des espèces d’immeubles aux allures pas fiables, qui tanguent quand les rafales de vent atteignent des sommets.... D’autres choisissent de s’enfermer sous terre, ils attendent que ça passe, ils préfèrent ne pas y croire. C’est vrai que c’est plus simple de faire semblant que d’affronter la réalité. Enfin ça, c’est pour ceux qui ne font pas partie de l’élite. J’ai lu quelque part que cette élite ne s’est pas agrandie depuis l’époque. Ils font tous partie d’une sorte de club, ils ont l’eau et l'électricité à domicile. J’ai lu autre part que c’était des conditions de vie tout à fait normales, il y a de ça un demi-siècle. Alors que s’est-il passé, me demanderez-vous ? Je n’en sais rien. Apparemment, c’était progressif, si progressif que malgré les alertes des spécialistes, les gens n’y croyaient pas. Et puis un jour ça a été la réalisation pour tout le monde. Il paraît que c’est quand les riches des riches ont décidé qu’il valait mieux être cryogénisé dans l’espace que de rester vivre sur Terre, que la population a commencé à réagir. Selon les journaux, personne ne s’attendait à ça et tout a accéléré très rapidement après leur départ. Les journaux disent que le côté animal a pris le dessus pendant un temps, que les gens ne pensaient pas à leurs prochains à part s’ils étaient de la même famille. De fait, ils ont cédé à la panique alors que ce qu’ils vivaient n’était rien comparé à ce que nous vivons. Tout s’est détérioré petit à petit, les glaciers ont fondu, le niveau des océans et des mers a augmenté, les températures aussi, les tempêtes se sont faites de plus en plus régulières, les vents plus violents, les catastrophes plus meurtrières. Puis le temps s’est transformé, aujourd’hui on passe d’un extrême à l’autre. Il peut pleuvoir pendant 30 minutes sans interruption et de suite après, on peut ressentir la chaleur en journée ou le froid la nuit, de manière extrême. J’ai lu dans un des rapports éparpillés un peu partout dans ce qu’il reste de la bibliothèque, que dépasser les 50°c était impensable il y a de ça 80 ans. Que les grosses chaleurs ont fait beaucoup de morts un peu partout dans le monde avant que la population ne réagisse. C’est drôle de se dire à quel point les conditions météos ont changé. Il paraît que les gens ont essayé de combattre tout ça pendant un moment et puis, qu’après quelques années, ils se sont rendus compte qu’on ne pouvait plus changer les choses. Alors ils se sont adaptés. Ils ont changé leur manière de faire, de manger, de s’habiller. Il paraît que de l’autre côté de la mer se trouve un peuple ayant construit des habitations sur l’eau, qui se déplacent avec les marées. Bon, bien sûr ça doit beaucoup bouger et il ne faut pas avoir le mal de mer, mais apparemment, c’est magnifique. J’ai aussi vu, toujours dans la bibliothèque, un vieux documentaire sur les communications de l’époque. Selon la vidéo, toute la planète entière était reliée et on pouvait discuter avec des gens à l’autre bout du monde. Les aînés disent que c’est vrai et que ce sont les éruptions solaires qui ont causé une surcharge électromagnétique -peu importe ce que ça veut dire- causant l’arrêt des communications. Maintenant, on a plus ça. Maintenant, on a seulement des nouvelles lointaines quand des catastrophes arrivent. Pas plus tard qu’hier, un courrier est arrivé pour nous informer que les feux au Nord avaient repris. Ils ont déjà ravagé des milliers d’hectares et personne n’arrive à les contrôler. Alors, ça veut dire que d’autres personnes vont venir se réfugier. Comme si on n'était pas assez nombreux. Un jour, je pense que le vent détruira ces immeubles qui ne tiennent qu’à un fil et, quand ce jour arrivera, on devra partir nous aussi. Pour l’instant, on est chanceux, on vit bien, ou du moins, mieux que les autres. Nous on a encore des bâtiments qui tiennent debout, ce n'est pas le cas de tout le monde. Bien sûr, quelques personnes possèdent toujours les talents de leurs ancêtres pour réparer tout un tas de choses : les bâtiments, les routes, les puits etc… Mais la plupart des gens ont perdu les talents de ceux qui font partie des livres et des archives de la bibliothèque. C’est une vieille bâtisse, les anciens disent qu’elle est là depuis des siècles et qu’elle restera après nous. Les murs sont pleins de fissures, alors j’y crois pas trop. Mais j’aime bien m’y rendre, y’a des rapports un peu partout, des vestiges de “La Descente en Enfer” - c’est écrit comme ça sur un journal. Il paraît, d’après ces rapports, que la pire des situations il y a 50 ans, c’était que les températures augmentent de deux degrés. J'aimerais bien savoir ce que pensent ceux de l’époque s’ils voyaient la situation aujourd’hui. Nous on a de grandes fermes avec pleins de légumes aux formes bizarres. C’est les gens dans les parcs qui s’en occupent. Eux, ils ont des espèces de petites habitations dans les arbres. C’est comme si elles volaient, je les aime bien, ça a l'air chouette de vivre là-dedans. Bon évidemment, quand les vents commencent à s’agiter c’est pas top parce que les branches se baladent et la maison aussi. C’est peut-être comme ça que fonctionnent les habitants de la mer. Eux aussi, ils doivent être accrochés à des arbres marins et se balader avec la forces des vagues. Il paraît qu’avant, il y avait pleins de pays différents avec pleins de gens aux habitudes différentes. Des petites îles aussi, éloignées de tout, avec des populations qui gardaient les traditions de leurs ancêtres. Il parait aussi que ça a été les premiers à souffrir des catastrophes et les premiers à devoir migrer parce que leurs îles se faisaient engloutir sous l’eau. L’eau, d’après les rapports, c’était la première chose qui a fait des ravages, beaucoup se sont noyés parce qu’ils n’avaient nulle part où aller. J’ai vu dans la bibliothèque les cartes du monde avant les inondations et, disons qu’aujourd’hui, la carte est beaucoup plus bleue. Après, on est pas vraiment à plaindre nous, on ne craint pas les animaux ni les Déformés. Oui, parce qu’il y a des personnes qui ont été attaquées par les substances qui servaient à faire de l'électricité autrefois. Non, nous l’élite nous protège. On les aime bien par ici, mais c’est pas le cas de tout le monde. Alors bien sûr, ils nous font envie avec leur eau propre qui arrive chez eux et leur électricité, mais au moins ils nous aident. Les anciens disent que de toute façon il ne faut pas trop leur en vouloir, c’est comme ça que ça a toujours fonctionné dans le monde. Et j’ai lu dans un des livres de la bibliothèque que c’était vrai. Les rapports et journaux sont de véritables mines d’or pour essayer de comprendre les anciennes civilisations, mais pas grand monde s’y aventure. Je crois même que je suis la seule. Il faut dire qu’ici, les gens en veulent beaucoup à ceux qui vivaient avant nous alors ils n'ont pas vraiment envie de savoir comment ça marchait sans galère. Moi j’adore, ça me fascine..

Séries Photographiques

Distorded

Ma série est composée de six photos me montrant avec un nouveau visage : celui-ci est re-défini par des traits et ondulations noirs qui se confondent dans l’obscurité de la pièce. Mon visage est transformé, on ne visualise plus ses contours et je joue avec la réalité :suis-je réelle ou bien suis-je un avatar, une modélisation 3D de mon propre corps modifié, distordu ? Je donne l’impression que je suis une créature, je me mélange avec le fond et je manipule la réalité pour jouer de mon identité physique.


Augmente-moi

La série est composée de trois clichés qui présentent un être hybridé. Il devient cyborg avec des composants électroniques qui augmentent ses capacités et lui permettent d’amplifier ses sens. Sa vue et son toucher sont améliorés par des LEDs qui lui permettent de mieux voir, plus loin, de ressentir des ondes magnétiques et des vibrations qui ne sont pas humainement perceptibles. Son ouïe est également modifiée, il lui est désormais possible d’entendre les flux sanguins, les cours d’eau à des dizaines de kilomètres ou même le bruit des battements d’ailes d’un papillon.

Vidéos Performances

Virtual Life

Virtual Life est une performance qui s’inspire du principe de l’illusion : je joue de la perception du spectateur pour lui faire croire à des présences qui ne sont pas réelles. Un papillon vole, dans le noir d’un appartement. Il resplendit dans l’obscurité de la pièce et sème le doute : est-il réel ? Les mouvements d’ailes obnubilent et fascinent, le spectateur est conscient qu’un papillon ne peut pas être phosphorescent, il remarque les indices que je laisse pour lui signaler le subterfuge mais l’immersion dans la scène l'interroge. Coup de lumière. Je lève le rideau sur la tromperie et rappelle le spectateur à la réalité. Le stratagème est révélé : le papillon est un hologramme numérique et irréel. Le spectateur est alors désillusionné, il comprend ce dispositif technique permettant la supercherie.


Merci

Je cherche à générer de l’incompréhension. Je crée un univers scientifique, on ne parvient pas vraiment à situer le lieu. Une personne recouverte d’un drap est manipulée par un homme en combinaison. Que se passe-t-il ? La patiente est-elle maltraitée par ce scientifique ? Est- modifiée, découpée, reconstituée à la manière de Frankenstein ? Je sème le doute, je contredis les intentions. Des remerciements soupirés, comme un soulagement, retournent la situation. Ma performance est un hommage direct à la série auditive Calls. Le soupir final est à la fois un moyen de créer de la confusion mais il est également un remerciement à cette série qui m’a embarquée dans son univers.


Métamorphose Fictive

J’utilise des pétales d’oeillets pour me créer un masque organique. Ces pétales envahissent petit à petit mon visage et forment un motif modulaire. Je mets en avant un processus de transformation en un être hybride, en connexion avec la nature et les êtres la peuplant. Je transforme mon aspect par ce masque qui ne laisse plus qu’entrevoir mes yeux. Mon identité est alors modifiée, je suis métamorphosée en un “cyborg végétal”. Ma performance s’inspire des principes du design fiction.